Une imposture écologique.
On prétend que la défense de Wissant, par une défense en enrochement ou par d’autres moyens dits « durs », serait anti- écologique, par une artificialisation de la côte.
Mettons en regard le coût écologique d’un abandon du bas Wissant.
La relocalisation se ferait nécessairement sur des terres agricoles. Il faudrait donc artificialiser au moins 150 hectares de bonnes terres, pour reconstruire la ville expatriée ; établir des routes et des réseaux, reconstruire une station d’épuration. Combien de tonnes de cailloux, de sable, d’acier et de béton ? Grosso modo 250 tonnes par maison. Donc, 75.000 tonnes rien que pour les 300 logements du bas Wissant, hors autres équipements publics . Et donc environ 75.000 tonnes de CO² envoyés dans l’atmosphère rien que pour le gros œuvre (environ 1t de CO par tonne de béton.)
Combien de tonnes de roches pour 300 mètres d’enrochement ? moins de 3.000 tonnes. Avec un coût carbone négligeable. Quand bien même Wissant devait devenir une presqu’île, le coût environnemental serait infiniment plus faible qu’une relocalisation.
Autre conséquence écologique majeur d’une politique d’abandon : Une ruine pérenne en bord de mer. Car si cette politique absurde semblait se confirmer, les propriétaires abandonneront tout entretien et réparation de leurs maisons vouées à la ruine. L’entretien de la digue sera inutile, elle s’effondrera. Le village se désertifiera peu à peu, laissant progressivement les ruines devenir majoritaires, en bord de mer, puis être englouties partiellement. Quel beau spectacle pour les touristes des pays voisins ! A moins de tout raser d’un seul coup, manu militari, avant même la reconstruction dans les champs de l’arrière- pays ?

Une imposture économique.
On prétend que cette opération de relocalisation ne pénaliserait pas les propriétaires, puisqu’ils seraient indemnisés. C’est bien sûr une imposture !
Si on considère par prudence une valeur actuelle de 350.000€ par logement, on a une valeur totale des 300 logements du bas Wissant de 105.000.000€. Qui peut croire que l’Etat va faire des chèques à cette hauteur ? Sur quel budget ? Et pour combien de stations littorales en France ?
Bien sûr, s’il devait y avoir des expropriations, elles se feraient sur la base des Domaines, avec une valeur extrêmement dévaluée compte tenu des risques alors certains de submersion, et du manque d’entretien ou de l’abandon déjà en cours de certaines maisons fuies par leurs habitants.
A ces coûts éventuels d’expropriation s’ajouteraient les coûts de déconstruction de tous les immeubles abandonnés, et quand même, car il en faudra bien, une nouvelle digue quelque part.
En regard, les coûts de la sauvegarde du Wissant actuel sont sans commune mesure. Pour moins de 10 millions, on peut protéger Wissant pour 50 ans.
Car n’exagérons pas la montée – réelle- du niveau de la mer liée au réchauffement climatique. La hausse du niveau depuis 30 ans est de 2 mm par an. Au pire, le Giec annonce que la montée des eaux, à la fin du siècle « si rien n’est fait », pourrait atteindre 1,1 mètre. Que coûte 1 mètre de hauteur d’enrochement ? Presque rien.
La défense contre la mer est aussi vieille que la civilisation. Dante, dans la Divine Comédie » écrite au 14ème siècle, note déjà que « les Flamands, de Wissant à Bruges » construisent des digues. Va-t-on partout renoncer, et laisser Venise abandonnée aux aqua alta ? Les Pays- Bas vont-ils renoncer à élever leurs digues ? Alors, pourquoi délaisser Wissant, qu’on peut protéger à coût très modique ?

Une imposture démocratique.
Qui est en train de décider à la place des Wissantais ? Des fonctionnaires lointains et idéologues; quelques prophètes de malheur qui me font penser au professeur fou annonçant la fin du monde dans Tintin et l’Etoile Mystérieuse ; des élus extérieurs défaitistes ou ambitieux…
On aurait certainement trop de doigts dans une main pour compter les Wissantais approuvant ce scénario de repli, qui disqualifie de fait toute réflexion ou tout projet pour la préservation de l’existant.
Car à quoi bon commencer quelque effort de préservation ou de simple entretien, si tout cela est pour rien ?
Les Wissantais ne nient pas les enjeux de l’érosion et de la montée des eaux. Ils veulent néanmoins protéger encore pour 50 ans ce village qu’ils aiment de tout leur cœur, car ils savent que c’et possible, que c’est la solution la plus environnementale et la moins chère. Voulez- vous faire un référendum sur le sujet ? Inutile, on connait le résultat.
Ne laissons donc pas les « abandonnistes » accaparer le débat. Refusons de discuter ce prétendu repli, si ce n’est pour des scénarii pour le prochain siècle. Continuons à chercher et à mettre en œuvre les meilleurs moyens de défense, durs ou doux, durs et doux, peu importe, pour garder nos maisons.
Pour cela, faisons bloc, avec nos associations, autour de notre Maire, qui doit se sentir soutenue et poussée par nous tous, pour nous défendre sans faille, sans que le doute s’installe.
Pour prouver leur volonté, leur attachement, il faudra sûrement un jour que les Wissantais concernés acceptent de contribuer, peu ou prou, au coût de la défense, même s’il n’ont pas à la porter seuls. Ce débat là mérite d’être ouvert.
En tout cas, tout faire pour que nous ne soyons pas amenés à déclarer un jour : Wissant « Zone à Défendre ».

 

Bernard PROUVOST

18 avril 2021