Méthodes dites « passives » ou « dures » :

Principe : Il s’agit de méthodes d’aménagements statiques basées sur la construction d’ouvrages lourds en mer ou au rivage, généralement en enrochements naturels, mais qui peut aussi inclure les matériaux nouveaux (ouvrages réalisés p.ex. en géotextile ; marques stabiplage®, géotube®)

Avantages:

  • Arrêt provisoire du recul de trait de côte en arrière de l’ouvrage ;
  • Protection efficace contre les vagues et les tempêtes (protection locale d'une zone urbanisée p.ex., à l’image du perré de Wissant).

Inconvénients:

  • La pose longitudinale d’enrochements (ou boudins géotextiles) en haut de plage ne règle pas la problématique d’érosion. Bien qu’elle arrête provisoirement le recul du trait de côte, l’érosion va se poursuivre devant l’ouvrage avec une accélération de l’abaissement de l’estran, et pourra aboutir à des effets de bord marqués avec un recul accéléré du trait de côte de part et d’autre (à l’image de ce qui est observé sur la Dune d’Aval), en particulier si la dynamique longitudinale est importante. A terme une déstabilisation de l’ouvrage en enrochements est probable (risque de rupture brutale de l'ouvrage si celui-ci n’est pas dimensionné en conséquence).
  • Outre l’impact paysager particulièrement fort (artificialisation du littoral), un ouvrage durable de ce type en protection de massif dunaire suppose de ce fait un dimensionnement et donc un investissement conséquent (similaire au perré), doublé d’une gestion d’estran qui pourrait être plus importante encore due aux effets de ce point dur supplémentaire, et à la réduction des échanges plage/dune.

Ce type de solution peut apporter une protection à court terme, mais reste coûteux si réalisé dans les règles de l’art, et ne résout pas le problème de l’érosion, voire peut l’aggraver en haut de plage. Ce type de solution ne règle pas la problématique existant en Baie de Wissant et n’est donc pas intégré au dispositif de mise en défense proposé.

Méthodes dites « actives » ou « souples » (aménagements dynamiques) :

Principe : méthodes utilisant et agissant sur les matériaux naturels. Méthodes plus généralement dénommées méthodes « douces » et incluant les procédés « nouveaux » comme le drainage de la plage (procédé « Ecoplage® » ou système PEM « Pressure Equalizing Modules » - drainage vertical passif). Ces derniers ne sont pas réalisables cependant, à cause du fort taux d’érosion et d’abaissement de la plage. D’autres procédés innovants sont néanmoins proposés par la suite.

Les méthodes dites souples ou actives peuvent être réparties en cinq rubriques en fonction de leur mode d'action :

  • action sur le milieu liquide : propagation des houles, déferlements, obstacles divers, drainages ;
  • action sur les fonds : algues artificielles ou naturelles ;
  • action sur l’estran et l’arrière-plage : rechargements, remodelages, by-passing, protections des dunes ;
  • autres procédés : sacs en géotextile, roches électrolytiques, filets, etc.

Parmi les méthodes de gestion douces envisagées sont proposés en priorité les aménagements suivants :

  • Rechargement/remontée de sable du bas estran vers le haut de plage ;
  • Épis en pieux bois (ouvrages semi-perméables) analogues à l’existant et/ou avec ajout de modules expérimentaux écoconçus (expérimentation ; efficacité à démontrer) ;
  • Mesures de gestion dunaire (captage/stockage de sable éolien, gestion de la fréquentation, végétalisation, information) ;
  • Epis expérimentaux semi-perméables en Y, type SEMS ;
  • Filets anti-érosion type S-Able (expérimentation ; efficacité à démontrer).

4.3.2 Présentation des principales mesures de gestion douce proposées

Les photos et schémas qui suivent illustrent les différents types de mesures actives envisagés dans le cadre du projet de mise en défens :

Remontée de sable du bas estran vers le haut de plage / Reconstitution du front dunaire : Ensemble de la zone

  • Avantages : rétablissement d’un stock sédimentaire en prévision de tempêtes, permettant le rétablissement a minima d’une dynamique éolienne et la pose d’aménagements de type brise-vents par exemple ; protection instantanée dans le cas de brèches du cordon. Travaux rapides (24 à 48h pour des volumes modérés)
  • inconvénients : Persistance de l'érosion, suivi et entretien indispensables (mesures de gestion dunaire à reprendre si réalisé tardivement); incidences potentielles sur la zone traitée et/ou en aval transit dans le cas d’extraction de quantités de sédiments trop importantes et/ou concentrées sur l’estran ; impact potentiel sur la faune et la flore ;
  • Exemples d’application : Dune d’Aval à Wissant (AOT 2017-2022), Montalivet (Gironde)

 Ouvrages pieux bois, type épi hydraulique : Secteur Dune Aval et Perré Sud

  • Avantages : Simple à mettre en place, peu coûteux, meilleure intégration paysagère que des épis imperméables, plus sécuritaires (mieux visibles), matériaux naturels.
  • Inconvénients : Disposent d’un retour d'expérience limité et contrasté (mais dispositif a priori efficace à Wissant et Sangatte). Leur dimensionnement est par ailleurs empirique, sans méthodologie établie.
  • Exemples d’installation : Dune d’Aval à Wissant, Sangatte, mais aussi St Malo (35), Noirmoutier (85), Oléron (17), Cap Ferret (33).

 Gestion souple des massifs dunaires : Dune d’Aval et Dune d’Amont

Avantages : Peu coûteux (investissement limité) si conçu de manière adaptée ;

Inconvénients : gestion / canalisation du public nécessaire, entretien pouvant être significatif (clôtures, plantations, débroussaillage), ne fonctionne pas pour des cordons dunaires accolés à des zones basses (risque de submersion) et/ou pour des falaises d’érosion (nécessité de recharger au préalable et/ou de reprofiler le cordon).

Filets anti-érosion type Système ABLE : Secteur Dune Aval et Perré

  • Avantages : reconstitue le littoral en réalisant une accrétion naturelle structurée par des filets. Le système est repositionnable et extractible à tout moment. Théoriquement franchissable à marée basse par des engins de chantier, une fois du sable accrété sur le dispositif. Peu coûteux, et impact paysager limité, sous réserve d’efficacité à Wissant.
  • inconvénients : efficacité non démontrée dans les conditions particulières de Wissant et pour un rôle d’atténuation de la houle, risque potentiel pour les activités nautiques (baignade, planche à voile, kite surf, etc.).
  • Exemples d’installation : Baie d’Authie (suivi par le CEREMA), Saint-Brévin.

Système d’épis selon Maltais-Savard (SEMS) : Dune d’Amont

  • Avantages : Peu coûteux. Favorise l’accrétion à partir d’épis complexes semi-perméables (capte une partie seulement du transit). Capacité à capter aussi du sable éolien. Le système est facilement démontable et composé d’éléments naturels.
  • Inconvénients : efficacité à long terme peu documentée.
  • Exemples d’installation : Pointe-aux-Outardes, dans l’estuaire du Saint-Laurent (Canada ; marnage important et houle faible à modérée)
  •  

Intégration de modules écoconçus sur les nouveaux épis pieux bois, visant à augmenter la tortuosité et donc la dissipation d’énergie (concept SEABOOST) : Perré Sud

  • Avantages : amélioration de l’efficacité des épis pieux bois et création d’habitats artificiels concomitante (le système peut servir de support à des modules d’habitats artificiels complémentaires visant à accroitre la biodiversité ; cf. lus bas), et est facilement démontable.
  • Inconvénients : efficacité non documentée dans le contexte hydrodynamique de Wissant. Augmentation du coût du dispositif.
  • Exemples d’installation : non identifiés ; concept innovant.

Plus précisément concernant l’opportunité de création d’habitats artificiels :

Plusieurs initiatives ont récemment vu le jour dans différents endroits du globe (Etats-Unis, Australie, Japon, Singapour, Israël, Monaco, France, …) pour améliorer la capacité de colonisation benthiques des ouvrages maritimes côtiers. L’objectif sous-jacent est l’amélioration de la richesse spécifique sur les ouvrages, l’établissement de peuplements plus équilibrés, et le regain de fonctionnalités écologiques clés sur les secteurs côtiers anthropisés.

Les quelques démarches ayant été menées à ce jour pour évaluer l’intérêt de développer le potentiel écologique des infrastructures maritimes telles que les digues, les jetées, etc., identifient deux leviers majeurs pour accroître la richesse des communautés sur les ouvrages urbains en zone intertidale :

  •  la complexification de la surface du substrat (rugosité, anfractuosités),
  •  l’augmentation de la rétention d’eau à marée basse.

Ces conclusions ont amené différentes universités et plus récemment des entreprises à proposer des solutions en zone intertidale dont les retours d’expériences quant à l’efficacité écologique sont prometteurs pour différents groupes taxonomiques (patelles, bigorneaux, crevettes, poissons, macroalgues, oiseaux). Des illustrations d’expérimentations récentes menées en France, au Royaume-Uni et en Irlande sont présentées ci-dessous